Le nombre de permis délivrés pour la construction de logements neuf a plongé de 45% entre mars et mai 2020 comparé aux trois précédents mois. Un chiffre très inquiétant ! Et pourtant aucun euro du plan de relance ne sera attribué au marché du logement neuf. Le marché du logement neuf court-il donc vers une crise ? Quelles sont les raisons de cette chute du marché ?
Des chiffres qui inquiètent
En 2020, les promoteurs immobiliers s’attendent à une perte de 100 000 logements neufs, soit un quart de la construction annuelle. Entre avril et juin, 47% de moins de logements neufs ont été mis à la vente par rapport au deuxième trimestre de l’année 2019, soit moins de 18 400 logements.
Pourtant cette baisse n’est pas uniquement attribuable à la crise sanitaire. La période mars-juin 2020 ne marque en effet pas un virage à 180 degrés de la tendance qui se dégageait ces deux dernières années. Le marché du logement neuf est effectivement ralenti depuis plusieurs mois. En janvier 2018, le nombre de logements autorisés atteignait les 500 000 logements, contre 440 000 en décembre 2019.
Source : Ministère du logement
Le confinement n’a fait donc qu’aggraver une situation déjà critique. Revenons justement sur les raisons de ce marché du logement neuf en crise.
Première explication : des lois pour lutter contre l’urbanisation
Fin 2019, la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (loi ALUR) a renforcé la lutte contre l’étalement urbain. Celui-ci a effectivement un impact direct sur l’environnement et la consommation énergétique. La construction d’un nouveau quartier requiert notamment la construction de voiries supplémentaires, des nuisances sonores supplémentaires et une diminution de la biodiversité.
La loi favorise donc un aménagement raisonné des territoires. La réhabilitation de quartiers abandonnés ou de transformation des btiments (des bureaux en logements par exemple) doivent faire l’objet de projets d’urbanisation. Cette maitrise de l’urbanisation a été renforcée par le principe de « zéro artificialisation nette » des sols inscrit dans le plan pour la biodiversité de 2018. Les constructions doivent donc se dérouler sur des friches et non des terrains nus.
Deuxième explication : les élections municipales
L’approche des élections municipales a généralement tendance à freiner les opérations d’urbanisme. Les élus locaux dans cette période sont en effet plus réticents à l’approche des élections à signer des permis de construire. Ce fut également le cas pour ces élections 2020.
D'autant que le report du second tour des élections presque trois mois après la date initialement prévue a prolongé cette période de « stand-by ».
Les élections municipales ont amené une grande vague verte en France. De grandes villes, comme Lyon ou Marseille sont passés aux mains d’élus écologistes qui souhaitent revoir les projets de construction. Les maires seront sans doute plus vigilants sur l’octroi des permis de construire de logements, comme cela sera le cas à Montpellier.
Troisième explication : un accès aux crédits immobiliers durci
Au début de l’année, le Haut Conseil de stabilité financière avait tiré la sonnette d’alarme sur les conditions d’octroi des crédits immobiliers. Il avait notamment demandé à ce que les banques respectent le taux d'endettement des ménages de 33%. Les crédits immobiliers doivent également être accordés sur des périodes inférieures à 25 ans.
Certains particuliers ont donc dû renoncer à leur projet immobilier. La clientèle jeune est principalement concernée, se heurtant principalement au taux d’endettement maximum de 33%. La demande en logements neufs est donc à la baisse car ils se tournent majoritairement vers la location.
Quatrième explication : la crise sanitaire et le confinement
L’incertitude liée au contexte sanitaire et économique a gelé les appels d’offres des collectivités locales et des particuliers.
De plus, les chantiers actuels ont été arrêtés par le confinement et sont toujours ralentis par des problèmes d’approvisionnement. Les coûts des chantiers ont également augmenté afin de respecter les protocoles sanitaires. Des surcoûts qui devraient donc continuer dans les prochains mois…
Le plan de relance insuffisant pour les prometteurs immobiliers
Pour les prometteurs immobiliers, le plan de relance annoncé par Jean Castex le jeudi 3 septembre n'est pas suffisant. Pour Alexandra François-Cuxac, présidente de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI), « le logement neuf est clairement l’angle mort de ce plan de relance ». En effet le gouvernement a essentiellement orienté le plan de relance vers la rénovation énergétique des btiments. 650 millions d’Euros seront ainsi consacrés à la construction durable et réhabilitation des friches.
Pour la présidente, l’absence de mesures phares sur le logement neuf pourrait avoir des conséquences désastreuses sur l’emploi et la crise.
L’avenir des logements neufs en France n'est donc pas au beau fixe... Cela inquiète donc les professionnels du secteur en cette rentrée alors que l'avenir du dispositif d’investissement locatif Pinel est encore incertain. Pourtant il arrive à échéance fin 2021. Une date plutôt proche pour le logement neuf ! Il faudra donc visiblement attendre le projet de loi de finances cet automne pour remettre le sujet des logements neufs sur la table. La crise du logement neuf pourra-t-elle se résoudre par de nouvelles mesures gouvernementales?